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Question du chat pendant la conférence, de la part de Sylvie, enseignante à Nantes : Que veut dire faire de « l’économie autrement » ?

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Question du chat pendant la conférence : Donc est ce que ces indicateurs, censés représenter l’économie, l’influent également ? Et donc est ce que ces derniers peuvent être utilisés par les institutions pour manipuler l’économie ?

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Question du chat pendant la conférence : Les choix des politiques économiques traduisent/trahissent-ils un projet de société ou alors répondent-ils à des contingences matérielles, financières auxquelles les États doivent répondre ?

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Question du chat pendant la conférence : Pourquoi y a-t-il tant d’avis contradictoires en économie ?

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Question du chat pendant la conférence : J'entends qu'il y a des forces contraires en œuvre. Seulement en matière de choix économiques j'ai parfois le sentiment que l'intérêt général et public n'est pas nécessairement pris en compte. Sinon comment expliquer cette montée de la précarisation, ce fossé entre classes socioéconomiques ? A qui profite réellement les choix économiques effectués par les hommes politiques en France ?

[Bensasson Bruno]

Question du chat pendant la conférence, de Sylvie, enseignante à Nantes : Que veut dire faire de « l’économie autrement » ?

Si j’ai sous-titré le livre « comprendre l’économie autrement », c’est parce qu’il propose une démarche différente de ce qu’on trouve dans les autres livres, non pas opposée mais complémentaire. En effet, il emprunte au genre littéraire de la fable pour saisir l’économie d’abord comme une réalité sociale, que chacun d’entre nous vit plus ou moins consciemment, avant de la présenter comme une science. En cela il diffère des approches plus politiques, qui entrent dans le vif des débats de société, des approches plus historiques, qui décrivent les faits à travers le temps et l’espace, ou des approches plus théoriques, qui se concentrent sur des relations et modèles mathématiques.

Ce livre se veut à la fois pédagogique pour être accessible à tous sans prérequis, complet pour donner à voir l’économie à 360 degrés et non sous un angle singulier et en même temps assez court pour ne pas épuiser le lecteur. Lorsqu’on regarde de plus près les raisonnements, on retrouve des éléments de ce qu’on appelle la microéconomie et la macroéconomie. Le livre propose une forme de mésoéconomie, à mi-chemin, avec des biens et facteurs de production variés, plus ou moins mobiles, une mésoéconomie qui se veut plus réaliste que la macroéconomie classique et plus simple que la microéconomie, permettant de dégager des faits stylisés multiples pour décrire un grand nombre des enjeux sociaux de l’économie.

[Bensasson Bruno]

Question du chat pendant la conférence, de Hugo, étudiant à Paris : Donc est ce que ces indicateurs, censés représenter l’économie, l’influent également ? Et donc est ce que ces derniers peuvent être utilisés par les institutions pour manipuler l’économie ?

On reviendra sur les indicateurs à plusieurs reprises et notamment au chapitre 4 (titre 2, objet de la conférence de novembre). Une des grandes différences entre sciences sociales et sciences dures, c’est que les sciences sociales peuvent voire veulent influer sur l’objet qu’elles étudient. Les étoiles ne s’intéressent pas à l’astronomie si bien que l'astronomie ne modifie pas l'objet de son étude, la course des étoiles. Au contraire, certaines théories économiques peuvent voir veulent avoir une influence sur la façon dont les agents économiques – Etats, entreprises ou individus – se comportent. Et de fat, les politiques économiques peuvent s'inspirer des théories. Ce fut en particulier le cas de la théorie développée par John Maynard Keynes au 20e siècle mais pas seulement.

Les indicateurs socio-économiques (PIB/habitant, croissance annuelle du PIB, taux d’alphabétisation, espérance de vie, taux de chômage, inégalités, inflation, etc.) sont une façon de regarder certains aspects de l’économie. Il y a des indicateurs simples comme le PIB et des indicateurs agrégés comme l'Indice de Développement Humain (IDH), qu'a développé le grand économiste Amartya Sen, ou l'Indice de Progrès Véritable (IPV), qu'utilise le Canada.

Comme tout outil de mesure, ces indicateurs peuvent être utiles si on s’en sert bien et je crois que c’est le plus souvent le cas. Ils peuvent aussi être mal compris et mal employés, cela arrive. Le livre "L'économie n'est pas qu'une affaire d'argent" doit permettre notamment de mieux comprendre l’intérêt et les limites de tel ou tel indicateur. Tout outil de mesure peut aussi être faussé délibérément mais dans des systèmes démocratiques ouverts et avec des contre-pouvoirs efficaces, cela me paraît moins probable.

[Bensasson Bruno]

Question du chat pendant la conférence, de Marie-Anne, enseignante à Villeneuve-le-Roi : Les choix des politiques économiques traduisent/trahissent-ils un projet de société ou alors répondent-ils à des contingences matérielles, financières auxquelles les États doivent répondre ?

Cette question fait écho aux questions de Hugo. On reviendra sur le rapport entre politique et économie dès le chapitre 4 (titre 2, conférence de novembre). Le chapitre 9 (titre 3, conférence de décembre) sera consacré à  la production des biens et services publics. Le titre 7 (conférence d’avril) sera dédié aux politiques macroéconomiques (politiques budgétaires, monétaires et commerciales). Le titre 8 (conférence de mai) sera consacré aux politiques microéconomiques en lien avec les défaillances de marché (concurrence, pollution, fiscalité). Le chapitre 25, lui, se penchera sur les inégalités. Dans tout cela, il y a beaucoup de choix, que vous appelez sans doute des choix de société, au sen noble du terme. Notamment chaque fois qu’il faut choisir entre un enjeu de court terme et un enjeu de long terme, entre la satisfaction d’une personne et celle d’une autre personne ou entre la satisfaction d'une catégorie de personnes et celle d'une autre catégorie de personnes. Cela renvoie souvent à l’importance respective qu’on accorde à la liberté, l’égalité et la fraternité dans le projet de société.

Mais quel que soit ce projet de société, il est des contraintes qui s’imposent aux politiques, comme la force de gravité s’impose aux corps massifs. Ce sont plutôt des contraintes matérielles que financières. Si ce n’était que des contraintes financières on pourrait imprimer des billets et y échapper. On reviendra sur la finance au titre 5 (objet de la conférence de février) et sur les politiques macroéconomiques (budgétaires, monétaires et commerciales) au titre 7 (objet de la conférence d'avril). Mais le fait est qu’on ne se nourrit pas de billets de banque mais de nourriture, qu'il faut produire, production à laquelle il faut consacrer du travail qualifié, qui lui ne s'imprime pas comme des billets et est limité, qu'on n'augmente pas aisément par décret.

Cette rareté des choses, des ressources naturelles et du temps, s’impose aux politiques dans une large mesure même si l'éducation, la formation et l'innovation permettent à moyen et long terme de produire davantage, comme on l'a observé nettement depuis 1800. La science économique peut aider les politiques économiques à atteindre leurs buts, quels qu’ils soient, mais ces buts restent politiques.

[Bensasson Bruno]

Question du chat pendant la conférence, de Marianne, étudiante à Bordeaux : Pourquoi y a-t-il tant d’avis contradictoires en économie ?

C’est en effet une observation de sociologie ou d’épistémologie frappante : il y a beaucoup d'avis contradictoires en économie, peut-être plus que dans d'autres sciences dures et mêmes sociales. Notons d'abord que la contradiction peut avoir du bon. Le grand philosophe des sciences Karl Popper a même considéré que c'était le propre d'une thèse scientifique de pouvoir être réfutée, autrement dit contestée ou confirmée par les faits, à la différence par exemple d'une religion. S'il y a eu et il y a de grandes controverses en science physique, celles-ci n'opposent néanmoins plus physiciens de gauche contre physiciens de droite.

Je n’ai pas de réponse à la question mais peux juste formuler quelques hypothèses personnelles. Une hypothèse possible est que l’économie est encore jeune et fait l’objet de controverses d’autant plus vives que les faits sont moins établis. Il y a longtemps certains astronomes ont pu être brulés parce que leur vision contredisait la science dominante, elle-même bien mal établie. Quelques siècles plus tard, le métier d'astronome est moins dangereux.

Une deuxième hypothèse est que, l’économie étant une science sociale, elle se prête moins que d’autres sciences à des expériences si bien que des thèses opposées peuvent s’affronter pendant longtemps sans que des faits permettent de réfuter certaines et de trancher le débat. L'analyse des faits à travers le temps et l'espace permet d'y voir un peu plus clair mais l'économie étant un système complexe il est rare qu'on puisse isoler une seule cause et en analyser les effets pour conclure de façon incontestable au vu des données. L'économie expérimentale développée par l'économiste Esther Duflo vise justement à vérifier des hypothèses au moyen d'échantillons sociaux tests et témoins mais sur des champs microéconomiques fatalement un peu restreints.

Une troisième hypothèse est que les politiques économiques renvoient à des choix de société qui relèvent bien davantage de la politique que de l’économie : veut-on une société plus prospère ou une société un peu moins prospère mais plus égalitaire ? veut-on faire un effort climatique maintenant pour le bien des générations futures ? On a vite fait de prendre pour une controverse économique ce qui n’est qu’un bon débat de société.

Enfin, quatrième hypothèse, il y a une forme de parallélisme entre les systèmes d’organisation politique et les systèmes d’organisation économique et on importe parfois dans le débat économique l’opposition qu’on trouve entre les systèmes politiques selon qu’ils donnent plus d’importance à la collectivité ou aux individus.

[Bensasson Bruno]

Question du chat pendant la conférence, de Marie-Anne, enseignante à Villeneuve-le-Roi : J'entends qu'il y a des forces contraires en œuvre. Seulement en matière de choix économiques j'ai parfois le sentiment que l'intérêt général et public n'est pas nécessairement pris en compte. Sinon comment expliquer cette montée de la précarisation, ce fossé entre classes socioéconomiques ? A qui profite réellement les choix économiques effectués par les hommes politiques en France ?

Ce sentiment qu'il y a ou qu'il pourrait y avoir un écart entre certains choix économiques et l'intérêt général est un point de vue important, que je respecte évidemment aux plans personnel et sociologique, qu'il est bon d’essayer de comprendre et d'étayer ou de relativiser par des faits.

Il est assurément partagé par une partie significative de nos concitoyens, même si on doit aussi trouver des opinions plus nuancées ou franchement contraires. D'autres diraient que les dépenses publiques s'élèvent à 55% de la production nationale, ce qui place la France parmi les pays dans lesquels l'action publique est la plus importante et la plus redistributive.

D'autres encore diraient avec le grand économiste Adam Smith que la
poursuite des intérêts privés des producteurs et des consommateurs se rencontrant par la voie des marchés, concourt elle-même à une forme d'intérêt général. On reviendra sur tout cela dans les conférences suivantes.

Certaines analyses économiques supposent l’Etat bienveillant et soucieux de l’intérêt général. D’autres ont une approche plus sociologique et n’excluent pas que l’Etat suive ses propres intérêts ou que son jugement soit "capturé" par des intérêts particuliers. On est plutôt là sur le terrain de la science politique que de l’économie à proprement dite.

A titre tout personnel, ayant travaillé 10 ans en France au service de l’Etat, je penche plutôt pour la première option avec une précaution importante : déterminer l’intérêt général est un exercice subjectif et politique bien délicat, qui suppose non pas de s’enfermer dans une tour d’ivoire mais d’être très à l’écoute de tous les intérêts. Le jeu institutionnel des pouvoirs et des contre-pouvoirs, le rapport entre les élus politiques et les agents des administrations, l'écoute de toutes les parties et pas seulement de celles qui parlent le plus fort, la diversité des positions prises en compte, doivent y aider.

On reviendra plus précisément sur la question des inégalités au chapitre 25 (titre 9, conférence de juin). Les données montrent que la France est un pays parmi les plus égalitaires au monde et que les inégalités ont beaucoup chuté depuis 120 ans pour se stabiliser dans les dernières décennies. Ce n'est pas le cas de tous les pays, notamment des Etats-Unis mais il faut se garder de confondre, volontairement ou non, des cas très différents. On trouve beaucoup d'informations utiles et accessibles sur le site de la World Inequality Database, www.wid.world. La réduction de ces inégalités en France tient notamment aux progrès de l'éducation et aux redistributions opérées par l’Etat aux moyens des allocations sociales et des services publics fournis gratuitement, financés par toutes formes de prélèvement obligatoires (taxes sur la production, en particulier la TVA, cotisations sociales dites patronales et salariales, impôts sur les revenus du travail et du capital, etc.).

Pour aller plus loin, on verra qu’il faudrait réduire les inégalités de "capital humain" par un système d’éducation et de formation équilibrant encore mieux l’offre et la demande des différentes qualifications. L'importance du capital humain et donc d'un système d'éducation et de formation efficace est un point qui revient régulièrement dans l'analyse économique et dans mon livre "L'économie n'est pas qu'une affaire d'argent". Il va de soi que le système éducatif n'a pas pour seule fonction d'apporter des qualifications professionnelles, qu'il doit aider chacun à se développer, à s'épanouir, à penser et juger par lui-même, à vivre en société... mais apporter des capacités et des qualifications professionnelles reste une de ses fonctions sociales importantes de mon point de vue.

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Question du chat pendant la conférence, de Hugo, étudiant à Paris : Qu’entendez-vous en disant que la politique précède l’économie ?

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Question du chat pendant la conférence, de Fadila, étudiante à Paris : Mais alors les biens publics ne relèvent pas du champ de l'économie ? (par rapport à la discussion sur l'écologie)

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Question du chat pendant la conférence, de Nancy, enseignante : Ecologie, bien commun ?

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Question du chat pendant la conférence, de Nohan, étudiant à Reims : Comment les économistes peuvent-ils aider les politiques à décider ?

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Question du chat pendant la conférence, de Florence, ingénieure : Les modèles économiques sont-ils nécessairement irréalistes ?

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Question du chat pendant la conférence, de Mathieu, enseignant à Avion : Comment faire pour rendre l’économie concrète alors que les termes employés sont vite techniques ?

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Question du chat pendant la conférence, de Léo, étudiant à Clamart : Comment mieux intégrer dans les indicateurs les effets de la croissance économique comme la dégradation de l’environnement ?

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Question du chat pendant la conférence, de Lucie, professeur de mathématiques, Boulogne sur mer : Peut-on quand même faire de l’économie « si on n’est pas bon en maths » ?

[Bensasson Bruno]

Question du chat pendant la conférence, de Hugo, étudiant à Paris : Qu’entendez-vous en disant que la politique précède l’économie ?

On reviendra sur le rapport entre politique et économique tout au long du livre et notamment dès le chapitre 4 ("La fin précède les moyens") dans le titre 2, qui sera l’objet de la conférence Melchior du 9 novembre.

Mais je commence tout de même à répondre. L’économie est une réalité sociale. Et on appelle également économie ou science économique ou économie politique la science sociale qui cherche à décrire et comprendre cette réalité sociale. L’économie n’est d’ailleurs qu’une partie de la vie sociale, une partie importante mais pas la seule, loin s’en faut si on en juge par les débats publics et politiques. Comme toute réalité sociale, elle s’inscrit dans la vie sociale et dans des institutions politiques, qui sont l’objet de sciences cousines, la sociologie et la science politique.

Que les systèmes politiques soient autoritaires ou démocratiques, ils fixent des règles à la vie en société, obligent, autorisent ou interdisent. Fort heureusement, l’activité économique n’échappe pas à ces règles, à deux nuances importantes près.

Premièrement, si on définit l’économie comme une science sociale qui étudie le comportement d’agents qui visent à satisfaire des besoins matériels en dépit de la rareté des choses – des ressources naturelles et du temps – alors on doit constater que cette rareté est une contrainte. Cette contrainte s’impose à la politique et on ne pourra pas aisément y échapper. On n’y échappera pas en créant simplement de l’argent mais, éventuellement, par les progrès de la productivité, les progrès des technologies et des compétences individuelles et collectives.

Ensuite, si le politique fait le choix libre de l’ouverture économique du pays, opte pour des échanges internationaux plutôt que pour l’autarcie, accepte la mobilité des biens, des personnes et/ou des capitaux, alors le contexte économique international aura des effets y compris sur le fonctionnement économique national. On verra aux chapitres 11 ("S'ouvrir c'est mieux... mais pas pour tout le monde") et 12 ("La croissance des uns et le bonheur des autres") du titre 4 (conférence de janvier 2024) que l'ouverture vaut plutôt mieux que l'autarcie mais, qu'en s'ouvrant au commerce international, l'économie nationale s'expose à des aléas internationaux.

[Bensasson Bruno]

Question du chat pendant la conférence, de Fadila, étudiante à Paris : Mais alors les biens publics ne relèvent pas du champ de l'économie ? (par rapport à la discussion sur l'écologie)

Si ! Les biens et services publics (la défense, la justice, l’éducation, la santé...) relèvent bien du champ de l’économie, si on entend par là la façon de satisfaire les gens en dépit de la rareté des ressources. Le fait que leur production soit financée par les gens en tant que contribuables, via les prélèvements obligatoires, et non par les gens en tant que consommateurs, via des factures, n'enlève pas grand-chose à la contribution de ces biens et services à la satisfaction des gens.

On le verra dès le chapitre 6 sur les défaillances de marché (au titre 2, objet de la conférence de novembre) et surtout au chapitre 9, qui est dédié aux biens et services publics et aux facteurs de production à y allouer dans l'intérêt des gens. Ce que les biens et services publics ont de particulier c’est qu’ils ne peuvent pas être fournis de façon efficace par la rencontre de l’offre et de la demande sur des marchés, à raison de leur nature (non excludable et non rivale, concepts qu’on détaille dans ce chapitre 9), sans même entrer dans des considérations politiques ou sociales.

[Bensasson Bruno]

Question du chat pendant la conférence, de Nancy, enseignante : Ecologie, bien commun ?

La question de l’écologie sera abordée de façon plus approfondie au chapitre 23 (dans le titre 8, objet de la conférence Melchior de mai), qui traite des externalités négatives ou positives et notamment des pollutions. On l’abordera aussi au chapitre 27 (dans le titre 9, objet de la conférence Melchior de juin) qui traite des richesses et notamment du capital naturel.

La question philosophique de savoir si la nature doit être considérée comme un sujet en soi ou comme un bien de l’Humanité, pour les services qu’il lui rend, y est effleurée sans être approfondie. Le fait est que, dans les sociétés humaines, "la nature ne vote pas" et qu'en démocratie "elle n'a pas donné procuration" à qui que ce soit.

Si on se place dans la seconde approche, anthropocentrique, et si on regarde les choses d’un point de vue économique, alors il est en effet pratique de se référer à la typologie des biens, qui est évoquée au chapitre 6 et développée au chapitre 9 (du titre 3, objet de la conférence de décembre) relatif aux biens publics.

On y distingue quatre catégories de biens : les "biens publics purs", les "biens communs", les "biens de club" et les "biens privés". La nature s’apparente dans bien des cas à un bien commun, en ce qu’il n’est pas excludable (chacun y accède sans en payer le prix) mais qu'il est rival (quand on prélève trop sur la nature elle s’épuise).

[Bensasson Bruno]

Question du chat pendant la conférence, de Nohan, étudiant à Reims : Comment les économistes peuvent-ils aider les politiques à décider ?

C’est aux politiques de prendre les décisions proprement politiques, qui relèvent de choix de société. Les économistes n’ont pas grand-chose à dire de ces choix en tant qu’économistes quoi qu’ils en pensent en tant que citoyens. C’est éventuellement le domaine des philosophes ou des sociologues.

En revanche, les économistes peuvent aider les politiques à prendre des décisions de nature strictement économiques, conçues non pas comme des finalités politiques (j’entends par là des enjeux tels que l’effort de défense nationale, la liberté d’entreprendre, la réduction des inégalités, la préservation de l'environnement au bénéfice des générations suivantes ou en soi) mais comme des outils destinés à atteindre des fins.

[Bensasson Bruno]

Question du chat pendant la conférence, de Florence, ingénieure : Les modèles économiques sont-ils nécessairement irréalistes ?

Ce n’est pas une fatalité. Mais plus les modèles seront réalistes, plus ils risquent d’être complexes de compréhension et d’utilisation.

Si on veut être totalement réalistes, on doit admettre que beaucoup de décisions sont prises sur la base d’intuitions ou de désirs et non de calculs qui seraient fondés sur des informations coûteuses à collecter ; on doit admettre que les gens sont intéressés non seulement par ce qu’ils pourront consommer mais aussi par l’image qu’ils donnent aux autres ou qu’ils ont d’eux-mêmes en rapport avec les autres (altruisme ou supériorité) ; on doit admettre que les anticipations que nous faisons ne sont pas nécessairement rationnelles, que les choix que nous faisons à différents moments de notre existence ne sont pas toujours cohérents les uns avec les autres.

Tout cela peut sûrement être intégré dans des modèles mais à mesure que ces modèles deviennent de plus en plus compliqués, il est à craindre que leur usage devienne plus compliqué. Cela ne veut pas dire qu’ils soient inutiles mais il y a des chances qu’il ne soit pas d’une grande aide à la décision quotidienne, faute de pouvoir être paramétrés et opérés. Parfois, un modèle correct à 80% mais simple peut être préférable.

Et surtout, il faut considérer les modèles avec humilité, ne pas confondre le modèle et la réalité, ne pas "rêver" d'un modèle qui reproduirait la réalité humaine et sociale, ne pas opposer les modèles et les approches alternatives de l'économie, plus historiques, sociologiques ou politiques.

[Bensasson Bruno]

Question du chat pendant la conférence, de Mathieu, enseignant à Avion : Comment faire pour rendre l’économie concrète alors que les termes employés sont vite techniques ?

C’est ce que j’ai essayé de faire en revenant tout au long du livre, à chaque chapitre, à l’expérience élémentaire de Robinson sur son île, produisant et consommant des fruits.

Tous les concepts que j’introduis sont expliqués dans le cadre de cette fable simpliste. Vous me direz si cela fonctionne. Ensuite, pour les lecteurs qui le souhaitent, je vais plus loin en intégrant des modèles mathématiques, mais les formules sont parfaitement facultatives et les conclusions sont toujours exprimées en langage naturel, sans mathématiques.

Le but est juste de faire sentir le rapport entre des concepts qui eux ne sont pas mathématiques mais très pratiques, par exemple le rapport entre la quantité de travail et la production de fruits ou entre la production de fruits et la consommation de fruits. Il y a aussi des bandes dessinées qui illustrent cela en image. Et d’autres tentatives de vulgarisation sur des blogs.

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